Le livret d'Ivan Vsevolojski et Marius Petipa s'inspire de la version d'Alexandre Dumas d'un conte d'Ernst Theodor Amadeus Hoffmann : Nußknacker und Mäusekönig (Casse-noisette et le Roi des souris). La musique, confiée à Tchaïkovski et composée de février 1891 à mars 1892, est certainement une des musiques de ballet les plus populaires aujourd'hui et une des œuvres de Tchaïkovski les plus appréciées. « Je ne croyais pas moi-même au succès de ce ballet », dit-il à la fin de la représentation.
Casse-noisette est devenu, depuis sa création en décembre 1892, un véritable symbole musical. Le soir de Noël, Clara reçoit de son oncle un casse-noisette. Pendant la nuit, une merveilleuse féerie commence : dans le salon, les jouets s'animent et le Casse-noisette se transforme en prince…
Genèse
Après quelques discussions en novembre et décembre 1890, Vsevolojski demanda en février 1891 à Tchaïkovski la composition de cette œuvre en tant que première partie d'un gala en deux actes dont la première partie serait l'opéra Yolande et la deuxième, le ballet Casse-noisette. Ce ballet en deux actes devait présenter la chorégraphie de Marius Petipa, le maître de Ballet impérial, mais au final, elle fut créée par son assistant Ivanov, à cause des problèmes de santé de Petipa.Tchaïkovski était moins satisfait de la partition du Casse-noisette que de celle de la Belle au bois dormant. Il avait accepté la commission d'Ivan Vsevolojski avec réticence. D'après Modeste Tchaïkovski, son frère Piotr avait toujours eu beaucoup d'estime pour le conte d'Hoffmann, et c'est ce qui l'aurait poussé à composer la musique, bien que le scénario très édulcoré ne lui ait pas plu du tout.
Tchaïkovski composa la musique fin février, fin juin et début juillet 1891, à Frolovskoye, Rouen, et à Maïdanovo où il fit également l'orchestration entre janvier et mars 1892. La partition fut terminée début avril.
Création
Le ballet fut représenté pour la première fois au Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg le 18 décembre 1892 avec Stanislava Belinskaïa dans le rôle de Clara, Antoinetta Dell-Era dans celui de la fée Dragée, Pavel Gerdt dans celui du prince Orgeat, Sergueï Legat dans celui du Casse-noisette et Timofeï Stoukolkine dans celui de Drosselmeyer. Les rôles des enfants (Clara et Fritz) ont été effectuées par les enfants eux-mêmes, les étudiants de l'École impériale du ballet de Saint-Pétersbourg : Stanislava Belinskaya et Vassili Stoukolkine. Casse-noisette connut un certain succès et Tchaïkovski pensa que le ballet aurait assez de popularité pour au moins deux ans, le temps de créer une autre œuvre.Argument
Véritable fable sur le passage de l'enfance à l'adolescence, Casse Noisette se base sur le thème immortel de l'amour et des forces du mal, à l'instar du Lac des Cygnes. L’histoire est inspirée de la version d'Alexandre Dumas du conte d'Hoffmann, intitulée Casse-noisette et le Roi des souris ou Histoire d'un casse-noisette. L'intrigue est centrée sur une petite fille allemande du nom de Clara Stahlbaum ou Clara Silberhaus selon les versions. Dans certaines productions du Casse-noisette, Clara s’appelle Marie. Dans le conte d’Hoffmann, la petite fille s’appelle Marie ou Maria, tandis que Clara, ou Klärchen, est le nom d’une de ses poupées.Acte I
- Premier tableau
Le ballet commence avec l'Ouverture miniature. Puis le rideau se lève et dévoile la maison des Stahlbaum. Clara, son petit frère Fritz, et leurs parents terminent de décorer l’arbre de Noël, et reçoivent les invités pour fêter le réveillon : la famille, les amis, et le mystérieux oncle Drosselmeyer. Ce dernier apporte un grand sac de cadeaux pour les enfants. Tous se réjouissent, sauf Clara, qui n’a pas encore reçu de présent. Les enfants dansent au son d’une marche, d’un petit galop, des parents déguisés en Incroyables entrent dans le salon et distribuent des sucreries. Puis Drosselmeyer invoque des poupées à ressort et des soldats grandeur nature qui dansent tour à tour d’un pas diabolique.
Après cet étrange spectacle, Clara s’approche de Drosselmeyer pour lui demander son cadeau. Il n’a malheureusement plus rien à lui donner. Dans certaines versions, Clara court en pleurant dans les bras de sa mère ; dans d’autres, elle reste calme et souriante. Drosselmeyer invoque pour elle un Casse-noisette en forme de soldat en beau costume de parade. Clara est transportée de joie, mais son frère Fritz est jaloux et casse le Casse-noisette. Drosselmeyer le répare, et Clara le berce avant de le poser dans sa maison de poupée. La fête se termine sur l’air traditionnel de la Grossvater Tanz (la Danse du grand-père).
Les invités rentrent chez eux et les Stahlbaum vont au lit. Pendant la nuit, Clara se réveille pour aller voir dans le salon comment se porte son Casse-noisette. Alors que l’horloge sonne minuit, elle entend les souris qui grattent. Elle essaie de fuir, mais les souris l’en empêchent. Par enchantement, elle rétrécit et devient aussi petite qu’une souris (sur scène, l'arbre de Noël grandit). Le Casse-noisette prend vie, et avec son armée, ils viennent défendre Clara, et le Roi des Souris entraîne ses soldats dans la bataille contre Casse-noisette. Pour la bataille, la partition de Tchaïkovski reprend l’effet miniature de l’ouverture, en utilisant surtout les registres aigus de l’orchestre. Au milieu de la bataille, Clara jette sa chaussure sur le Roi des Souris et le Casse-noisette en profite pour le tuer avec son épée. Les souris se retirent, emmenant avec eux leur roi mort. C’est alors que le Casse-noisette se transforme en prince (dans le conte d’Hoffmann, le Prince est en fait le neveu de Drosselmeyer, qui avait été métamorphosé en Casse-noisette par le Roi des souris, et tous les événements qui suivirent le réveillon avaient été prévus par Drosselmeyer pour briser le sort).
- Deuxième tableau
Acte II
- Troisième tableau
Au terme de ce rêve merveilleux, Clara se réveille sous l’arbre de Noël avec un Casse-noisette dans ses bras et le rideau tombe. Dans la version de George Balanchine, elle ne se réveille pas ; Clara et le Prince Casse-noisette s’envolent dans un traîneau tiré par des rennes, laissant le rêve se réaliser, comme dans le conte d’Hoffmann.
Orchestration
Instrumentation du Casse-noisette |
Bois |
3 flûtes (la 3e prend le piccolo), 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes (en si bémol et la), 1 clarinette basse (en si bémol), 2 bassons |
Cuivres |
4 cors (en fa), 2 trompettes (en la et si bémol), 3 trombones (2 ténors et 1 basse), 1 tuba |
Percussions |
timbales, grosse caisse, cymbales, tam-tam, tambourin, castagnettes, triangle, glockenspiel, célesta (ou piano) |
Chœur |
chœur de 24 voix d'enfants ou de femmes (avec de préférence 12 sopranos et 12 altos) |
Jouets |
hochet, trompettes (en ut), tambours, coucou (en ut), caille (en ut), cymbales |
Cordes |
2 harpes, premiers violons, seconds violons, altos, violoncelles, contrebasses |
La musique
La musique de Casse-noisette est sans doute une des plus célèbres que Tchaïkovski ait écrites. Elle prolonge la tradition romantique et contient quelques-unes des mélodies les plus utilisées à la télévision ou dans les films comme le Trépak, la Valse des fleurs ou encore la Danse de la fée Dragée.Typiquement tchaïkovskienne, la musique de Casse-noisette possède de riches harmonies post-romantiques, arrangées à la sauce russe, créant d'intenses émotions. Le premier acte comporte néanmoins des références stylistiques de la musique de la fin du XVIIIe siècle, témoignant de l'admiration du compositeur pour Mozart, en particulier dans l'Ouverture miniature, la Marche, le Petit galop des enfants et la Danse du grand-père.
La partition est un véritable joyau. Elle fait appel à une profusion d'inventions mélodiques et une palette harmonique, jamais égalées dans un ballet. De fait, Casse-noisette contient quelques-unes des mélodies les plus connues du répertoire classique. L'Ouverture miniature est originale dans le sens où elle n'utilise que les registres aigus de l'orchestre et qu'elle nous plonge dans une atmosphère féerique. La Décoration de l'arbre de Noël confère à la pièce toute l'ambiance de Noël. Tchaïkovski utilise des instruments jouets pour une scène de l'acte I. Une autre nouveauté dans la partition — bien que Tchaïkovski l'ait déjà utilisé dans sa ballade symphonique Le Voïévode (jouée pour la première fois en 1891) — est l'emploi du célesta, instrument récemment créé à l'époque de la composition du ballet et qui, par sa couleur tendre et quasi enfantine, évoque à la perfection Clara. Particulièrement connu dans le solo de la Danse de la Fée Dragée, le célesta apparaît dans d'autres passages de l'acte II. Le son enchanteur de l'instrument suscita l'admiration du public. Pour reproduire le caractère insolite du deuxième acte, il essaie de trouver des effets originaux de timbre.
Programme du ballet
- Ouverture miniature
Acte I
- Premier tableau
- 1. La Décoration de l'arbre de Noël - Entrée des invités
- 2. Marche
- 3. Petit galop des enfants - Entrée des parents
- 4. Arrivée de Drosselmeyer - Distribution des cadeaux
- 5. Le Casse-noisette - Danse du grand-père
- 6. Scène - Départ des invités - Nuit - Clara et le Casse-noisette
- 7. Scène - La Bataille
- Deuxième tableau
- 8. Scène - Une forêt de sapins en hiver
- 9. Valse des flocons de neige
Acte II
- Troisième tableau
- 10. Le palais enchanté du Royaume des Délices
- 11. L'arrivée de Casse-noisette et de Clara
- 12. Divertissements :
- I. Chocolat - Danse espagnole
- II. Café - Danse arabe
- III. Thé - Danse chinoise
- IV. Trépak - Danse russe
- V. Danse des mirlitons
- VI. Mère Gigogne et les polichinelles
- 13. Valse des fleurs
- 14. Pas de deux - Danse du Prince et de la Fée Dragée
- I. Andante maestoso
- II. Variation pour le danseur - Tarantelle
- III. Variation pour la danseuse - Danse de la Fée Dragée
- Coda
- 15. Valse finale et apothéose
Versions du XXe siècle
- Vassili Vainonen (1934) pour le Kirov, considérée comme « le » modèle classique, avec absence de la Fée Dragée et rôle plus accru de Drosselmeyer.
- George Balanchine (1954) pour le New York City Ballet
- Fernand Nault (1964) pour les Grands Ballets canadiens[1]
- Rudolf Noureev (1967) pour le Ballet Royal de Suède, (1985) pour l'Opéra de Paris
- Mikhail Baryshnikov (1976)
- John Neumeier (1971)
- Mark Morris (1991) sous le titre The Hard Nut
- Andy Degroat (1995)
- Maurice Béjart (1998)
- Jean-Christophe Maillot (1999) sous le titre Casse-Noisette Circus.
- Thierry Malandain (2001) une adaptation féerique au Ballet Biarritz
- Kirill Simonov (2001) une adaptation avec Mikhaïl Chemiakine pour le Mariinsky
- Aaron S. Watkin et Jason Beechey (2011) pour le Dresdener Semperoper Ballett, dramaturgie de Stefan Ulrich, avec la Studierende der Palucca-Hochschule für Tanz Dresden, et les chœurs de la Sächsische Staatskapelle Dresden.
Galerie
Première représentation en 1892 Olga Preobrajenskaia (la Fée Dragée) et Nikolai Legat (le Prince) dans une production du Ballet Impérial vers 1900 Croquis original
d'Ivan Vsevolojski
des costumes de La Mère Gigogne de l'acte IICroquis original
d'Ivan Vsevolojski
pour le ballet Casse-noisette
Suites de concert et arrangements
- Tchaïkovski arrangea une suite d'extraits de la partition. Celle-ci fut jouée sous la direction du compositeur, du 7 au 19 mars 1892, peu avant la première du ballet complet. Cette suite, op. 71a, comprend huit numéros :
- Ouverture miniature
- Marche
- Danse de la fée Dragée
- Danse russe (Trépak)
- Danse arabe
- Danse chinoise
- Danse des Mirlitons
- Valse des fleurs
- En 1892, Sergueï Taneïev publia son arrangement du ballet pour piano seul, mais au vu de la difficulté de l'arrangement, Tchaïkovski en fit sa propre version simplifiée.
- Percy Grainger composa une Paraphrase sur la Valse des fleurs pour le piano.
- Le pianiste et chef d'orchestre Mikhaïl Pletnev arrangea sept numéros du ballet dans une suite de concert virtuose pour le piano :
- Marche
- Danse de la fée Dragée
- Tarentelle
- Intermezzo [arrangement du no 8 du ballet]
- Trépak
- Danse chinoise
- Andante maestoso [du no 14 du ballet]
Adaptations cinématographiques
- Fantasia de Walt Disney : Danse de la fée Dragée, Danse chinoise, Danse des mirlitons, Danse arabe, Danse russe et Valse des fleurs (1940)
- Le Prince Casse-noisette de Paul Schibli, long métrage d'animation (1990)
- Barbie Casse-noisette, long métrage d'animation (2001)
- The Nutcracker: The Untold Story (décembre 2009)
Notes et références
Annexes
Liens externes
- Casse-noisette : partitions libres dans l’International Music Score Library Project.
- Partitions gratuites de Casse-noisette (Nut-cracker), pour piano
- Partition gratuite avec tablatures + exercices + vidéos de "Casse-noisette" (Nut-cracker) pour guitare électrique
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